12 janvier 2012 |
| Publié par: Mickael Attiach
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En marge de l'audience solennelle de rentrée de la Cour d'Appel de Nîmes, au cours de laquelle Michel Desplan, nouveau procureur général, a été officiellement installé, les avocats du barreau de Nîmes et des autres barreaux du ressort de la Cour d' Appel correctionnelle de Nîmes (qui recouvre le Gard, la Lozère, le Vaucluse et l'Ardèche) ont boycotté l'évènement. En cause : une police pénale jugée trop répressive et qui se traduirait notamment par des condamnations presque systématiquement plus fermes d'après les avocats.
Le bâtonnier Fortunet (pour le Barreau d'Avignon), a été désigné par ses pairs pour lire la motion de défiance portée par le Conseil de l'Ordre commun et extraordinaire réuni pour l'occasion.
« Les barreaux d'Alès, d'Avignon, de Carpentras, de Mende, de Nîmes et de Privas, réunis en Conseil de l'Ordre commun et extraordinaire le 12 janvier 2012
RAPPELLENT :
- le pouvoir souverain des juges pénaux de statuer sur la culpabilité et sur la peine y compris par aggravation,
- le droit d'appel ouvert à toutes les parties présentes de première instance,
CONSTATENT depuis le mois de septembre 2010, et encore plus depuis le mois de septembre 2011, les lourdes difficultés rencontrées par les avocats et les justiciables lors des audiences de la Chambre Correctionnelle de la Cour d'Appel de NÎMES :
1°) les incidents d'audience à caractère répétitif (rapport tronqué et orienté, interrogatoire agressif du justiciable, réflexions désagréables formulées à haute voix par les membres de la Chambre, indifférence affichée aux explications des avocats intervenant tant pour la défense que pour les victimes, incitations vives à écourter les plaidoiries) révélatrices du fait que la décision est déjà acquise dans l'esprit du juge.
2°) les décisions qui se traduisent dans une immense proportion :
- Soit par une infirmation des relaxes prononcées en premiere instance,
- Soit par une extrême aggravation de la peine et la multiplication de mandats de dépôt prononcés sur l'audience,
3°) les inévitables conséquences de ce qui précède, à savoir :
- Le mépris ostensible des décisions de première instance systémiquement infirmée dans un sens favorable à l'accusation,
- La dissuasion, sauf pour le ministère public, de s'adresser aux juges du second degré, ce qui induit la disparition de fait d'un droit fondamental garanti par la loi et la CEDH [Convention Européenne des Droit de l'Homme] : le droit de faire appel !
4°) l'échec de l'alerte exercée par les Ordres concernés auprès du Premier Président de la Cour d'Appel NÎMES;
Dans cette situation de contrainte, il est décidé les mesures suivantes :
1 – Aucun avocat ne sera présent à l'audience solennelle de rentrée de la Cour d'Appel de NÎMES qui se tiendra le jeudi 12 janvier 2012 à 14h30.
2 – Une journée d'action est fixée au Mardi 17 janvier 2012 : refus des avocats de se présenter devant la Chambre des Appels Correctionnels de la Cour d'Appel de NÎMES, devant laquelle il ne sera plus assuré aucune permanence pénale.
3 – Convocation en Assemblée Générale Extraordinaire unique des Barreaux d'ALES, AVIGNON, CARPENTRAS, MENDE, NÎMES et PRIVAS avec pour ordre du jour l'absence du tout Avocat aux audiences de la Chambre des Appels Correctionnels de la Cour d'Appel de NÎMES. » [fin de citation]
A noter que la motion a été transmise, hormis aux organes de presse :
- au Conseil National des Barreaux
- à la Conférence des Bâtonniers
- au ministre de la Justice et des Libertés, Garde des Sceaux,
- au Premier Président près la Cour d'Appel de Nîmes,
- au Procureur Général près la Cour d'Appel de Nîmes,
- à tous les Bâtonniers des Barreaux de France et d' Outre-Mer .
Le bâtonnier Fortunet (Barreau d'Avignon) a tenu à ajouter à la suite de cette lecture : « Je veux signaler le caractère tout à fait inédit ou exceptionnel de cette délibération qui est prise par la réunion des conseils de l'ordre de tous les barreaux du ressort de la Cour qui se sont réunis. C'est la première fois de l'histoire des barreaux que cela se produit. Et les Assemblées Générales qui vont être organisées dans le cadre des dispositions de la motion lue ici-même, donneront lieu à une Assemblée Générale extraordinaire de l'ensemble des barreaux réunis » .